Makaveli

Mali : le 8 mars ne se fête pas au village

Aujourd’hui, le monde entier s’offusque, trouve abjectes et arbitraires les disparités entre les hommes et les femmes, sur les questions de droits et de liberté. Si les nombreuses luttes entreprises tous azimuts ont produit un impact considérable pour l’émancipation de la femme, un effroyable clivage demeure perceptible entre les femmes citadines et les femmes rurales quant à l’accès aux soins, à l’information, à  l’éducation dans plus d’un pays. C’est le cas au Mali.

Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars est célébré en l’honneur de celle-ci, également pour parler des défis et avancées dans cette longue noble entreprise de libéralisation de la femme. Mais le 8 mars a une double connotation, selon que l’on soit une femme instruite citadine ou une femme non instruite vivant dans un village. Car ce ne sont pas toutes les femmes qui bénéficient des avancées pour leur émancipation. Nombreux facteurs sous-jacents concourent à cet état de fait.

Le besoin d’établir une bonne communication

A cause d’une mauvaise et insuffisante politique d’information, beaucoup de personnes voient toutes les questions d’émancipation de la femme comme un stratagème machiavélique des Occidentaux pour libéraliser et pervertir la femme. Surtout dans les villages où le taux de scolarisation est faible.

Ces incompréhensions rendent le travail de sensibilisation et d’information, pour l’émancipation de la femme beaucoup plus lent et laborieux. Pourtant il est nécessaire de renouer le dialogue entre tous les acteurs de la société, afin de dénouer le nœud gordien.

Pour ce faire, il y a lieu d’élaborer des stratégies avec une démarche inclusive, partant de nos réalités et valeurs socio-culturelles, pour la déconstruction de nombreux stéréotypes et dogmes sur les femmes, sensibiliser au respect de la femme, pour qu’en synergie nous œuvrions pour son émancipation et pour l’égalité.

Femmes du Village Mali
Femmes du Village Mali Photo: Makaveli

Il ne suffit pas de légiférer

Les lois ne suffisent pas pour protéger et assurer la liberté et le respect des droits de la femme. On prône la représentativité des femmes à des postes nominatifs et électifs, mais quid de la formation à grande échelle des femmes, sur la politique, la gouvernance, surtout pour celles non alphabétisées.

On parle de l’accès à l’emploi et d’amélioration des conditions de travail pour les femmes, mais ces points n’aident pas forcément cette majorité de femmes non diplômées travaillant dans les petits commerces, ou disons l’économie informelle. Elles ont un besoin crucial de formation sur entrepreneuriat, la gestion des revenus, et d’avoir l’accès aux possibilités de financements pour booster leurs petites entreprises.

De même qu’il ne suffit pas d’inscrire les filles à l’école, il faut de véritables programmes de suivi des filles à l’école pour pallier la problématique de l’abandon des classes. En plus des discours, il faut établir et appliquer des résolutions efficaces, dissuasives, et répressives sur l’excision, le mariage précoce.

Femme partant au champ Mali
Femme partant au champ Mali Photo: Makaveli

La solidarité féminine

Les femmes instruites ou les fonctionnaires ne doivent être les seules à jouir des fruits de la lutte des femmes du monde. Les politiciennes et autres leaders représentantes des femmes dans les villes ne doivent pas être les seules à avoir accès aux opportunités.

Les organisations féminines ne doivent pas se limiter dans les grandes villes. Les querelles de leadership, la corruption, les intérêts égoïstes compromettent l’efficacité de nombreux programmes d’aide à l’intention des femmes. C’est aux femmes d’outrepasser ces futilités, pour le bien de toutes.

Alors qu’on se pavane dans de beaux bazins, à prononcer des discours grandiloquents sur les médias, au nom des femmes, d’autres parcourent toujours des kilomètres pour trouver de l’eau potable. Les femmes aux villages ont toujours des problèmes quant à l’accès à l’éducation, à l’information, aux soins de santé.

Elles restent sous le joug de phallocrates et le poids des traditions. Un inextricable bourbier, où elles n’ont même pas la latitude de décider avec qui ou quand se marier.

Les femmes doivent se soutenir, partager les savoirs sans distinction des positions géographiques et du niveau intellectuel ou la position sociale.

Quand on parle de la lutte pour la femme, on doit parler des femmes en général, les opportunités, l’information, la justice, l’éducation, les libertés doivent être accessibles à toutes les femmes du monde.

Les disparités entre hommes et femmes sont aussi haïssables, que celles entre les femmes elles-mêmes. La lutte pour les droits et la liberté des femmes n’est pas un combat pour une élite de femmes instruites.


Mali : voici pourquoi on mettait des jarres d’eau devant les maisons

La culture malienne se caractérise par son ouverture à l’autre, la générosité et le partage. Sous différentes formes et à travers plusieurs aspects, elle manifeste son oblativité. L’autre donne tout un sens à la vie, car le bonheur se conjugue au pluriel.  

Il y a seulement une vingtaine d’années, devant les portes de nos maisons on mettait des « ji daga » : une jarre remplie d’eau a l’intention des passants voulant éventuellement se désaltérer. Les jeunes filles de la famille étaient tenues de la propreté et du remplissage régulier du ji daga et les garçons s’occupaient de l’arrosage des arbres.

Cette pratique aujourd’hui révolue était l’expression de la générosité de notre culture, on supposait qu’une personne ne devait pas avoir à demander ni à souffrir pour trouver de l’eau. Chacun devait pouvoir étancher sa soif, mettre sa tête sous un tronc d’arbre pour trouver de l’ombre, bref, prendre un peu de répit.  Les devantures des maisons étaient donc adaptées, tels des oasis.

Il était inconcevable que l’on doivent débourser de l’argent ou peiner pour trouver à boire. La preuve, quand vous entriez dans une famille, avant toute chose on vous apportait de l’eau à boire.  Dans notre culture les choses essentielles et indispensables à la vie (eau, nourriture et toit) ne devaient manquer a personne, elles étaient les choses les mieux partagées, des usufruits.

Quelques rares familles continuent à perpétuer cette pratique séculaire, même si pour des questions d’hygiène, dans certains endroits, les jarres d’eaux ont été remplacées par des robinets à l’extérieur des concessions.

Robinet pour les passants
Robinet pour les passants Photo: Makaveli

Cette pratique est assez simple et lourde de sens : tendre la main à son prochain. C’est l’expression naturelle de nous-mêmes, on considère que ce qui est à soi est aussi pour toute la communauté. Quand il y en a pour un, il y en a pour deux.

Le Mali est le pays du vivre ensemble, différentes ethnies, cultures, traditions… y coexistent, avec comme dénominateur commun la paix et le partage. Nous pensons que nous ne sommes rien sans les autres, « nous venons au monde dans la main des hommes, nous repartons dans la main des hommes ». C’est pourquoi, dans chacune de nos actions, une attention particulière est accordée à l’autre.

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Jarre d’eau devant une porte a l’intention des passants. Photo: Makaveli


Mali : il n’y a pas d’âge pour aimer son pays et participer à sa construction

La construction d’un pays est une affaire de patriotisme, elle transcende les dissensions politiques, les différences ethniques, la diversité des croyances et les questions d’âge. Dire que les jeunes doivent impérativement venir au pouvoir pour que le Mali se développe, c’est escamoter les vraies questions. 

« Il faut que les jeunes viennent au pouvoir pour que les choses s’améliorent », « les jeunes ne sont pas compétents, nous devons rester pour ne pas que le pays s’engouffre. » Le litige intergénérationnel n’est pas une solution à la crise malienne. Même si des voix s’unissent pour dire unanimement que « les jeunes doivent venir au pouvoir, pour pouvoir espérer une sortie de crise ».

La jeunesse accuse la classe politique malienne d’être à la base des déboires que connait le pays, celle qui est au pouvoir depuis 1991 et se passant le pouvoir, comme dans un jeu de passe-passe, selon les affinités sans pour autant se soucier du sort du peuple. En retour les vieux pensent que les jeunes sont impatients, dévergondés, paresseux et incompétents.

Cette attitude des vieux qui veulent s’éterniser au pouvoir n’est autre que le signe de leurs déconfitures. Redoutant d’être poursuivis pour corruption et ne sachant que détourner des fonds, ils ont du mal à s’extirper de ce cercle vicieux. Ce qui entraîne la scission, des soubresauts, le sous-développement etc. L’alternance doit être assurée pour laisser à tous la chance d’œuvrer pour sa patrie.

Mais il ne suffit pas d’être jeune pour représenter la solution. Ce sont les qualités morales et éthiques, les compétences intrinsèques de tout un chacun, et notre capacité à mettre l’intérêt général au-dessus du personnel qui font qu’une nation prospère. Les jeunes oui, mais ceux qui ont les compétences, la vision, la volonté.

Les questions de valeurs et d’éthique doivent prévaloir sur la quête de pouvoir ou de position. Déjà, regardons ce que nous faisons au sein de nos organisations de jeunes, des querelles de leadership, tricheries, trahisons. Nous n’arrivons pas toujours à faire front commun pour nos intérêts, d’où l’existence d’une myriade d’organisations de jeunes mais avec très peu d’impact.

Si la jeunesse veut le changement, elle doit consentir à faire des sacrifices. Se sacrifier pour travailler plus, avoir plus de compétences, se sacrifier pour prendre les rues et sortir de la virtualité des réseaux sociaux.  Se sacrifier en refusant les petits sous pour voter, exercer le contrôle citoyen. Apprendre et partager son savoir. Connaitre ses droits et devoirs pour pleinement jouer son rôle de citoyen. Adopter les bons comportements éthiques pour le vivre ensemble, aussi pour influencer les plus jeunes. C’est cela, aimer son pays.

Jeunes ou vieux, nous avons tous quelque chose à apporter à notre pays. Avec leurs longues années d’expérience, les vieux peuvent nous être des lanternes, et nous avec notre force de travail nous pouvons agir plus rapidement et efficacement.

Nous n’avons pas impérativement besoin d’être au pouvoir pour changer considérablement nos communautés. Si vous avez un projet une idée pour développer votre pays, n’attendez pas d’être président, ministre, leader de votre association pour l’implémenter, les grands changements commencent petit à petit.


Recyclage à la malienne : la seconde vie des pneus

Ce n’est pas un euphémisme de dire que l’Afrique est la poubelle de l’Occident. Des tonnes d’objets périmés y sont déversés chaque année. Pourtant, avec ces tas d’objets obsolètes, certaines personnes arrivent avec ingéniosité à créer un business rentable.

C’est dans le charivari du marché de Médine à Bamako, poussières, soleil, perdu dans une marée humaine, que j’ai rencontré Karim. Assis dans un petit coin entre vendeurs de charbon et Yougou-Yougou (friperie) en tout genre.

Ce marché est réputé pour la vente de Yougou-Yougou, et d’autres produits de casse ou « au revoir la France ». Ici, riches ou pauvres, chacun y trouve son choix. Pour certains, ce sont les prix qui attirent, et pour d’autres c’est la qualité, car les produits chinois qui inondent le marché du prêt-à-porter sont souvent des ersatz.

Ventes de Pneus Casse Photo: Makaveli

On ne réinvente pas la roue, mais les pneus si

Les pneus usés viennent d’Occident, et sont vendus sur le marché. Les automobilistes les préfèrent à cause de l’accessibilité de leurs prix. Réutilisés jusqu’à l’usure, ils n’ont de place que sur les montagnes d’ordures. Régulièrement, Karim fait le tour de la ville pour collecter les pneus usés de camions et les boîtes de conserves sur les dépôts d’ordures. C’est là qu’ils sont récupérés pour une nouvelle transformation et réutilisation.

De ces pneus usés, Il tire son fonds de commerce, les transforme en chaussures (des nu-pieds). A la fois esthétique, pratique et abordable.

Chaussures
Chaussures Made in Mali Photo: Makaveli
Chaussures made in Mali
Chaussures Made in Mali Photo: Makaveli

Les chambres à air sont transformées en puisette, une espèce de sac pour puiser l’eau des puits. Un palliatif aux pompes d’eau qui restent relativement chères.

Puisette
Puisette Photo: Makaveli

Les boites de conserve en tirelire

Les tirelires, une solution pour faire de petites épargnes à la maison en toute sécurité. Les boîtes de conserves sont retravaillées pour répondre à ce besoin.

Tirelire
Tirelire Photo: Makaveli

Des déchets destinés à détériorer notre environnement et enlaidir nos rues, Karim a fait un commerce rentable. Une activité qu’il pratique depuis des lustres et qu’il a appris de son père. Avec ce travail, Karim arrive à nourrir décemment sa famille.

Une contribution à la préservation de l’environnement et un boost pour notre économie, en l’absence de moyens industriels de traitement des ordures. Un exemple pour dire que les champs du possible sont infinis et qu’avec peu nous pouvons faire beaucoup.

Dépôts d’ordures Photo; Makaveli

 


4 comptes Instagram à suivre pour découvrir le beau Mali

Quand on parle du Mali, on parle de générosité, d’hospitalité et de chaleur humaine. Un pays de paix et d’ouverture ; ouverture d’esprit, ouverture à l’autre. A contre-courant des stéréotypes de pays pauvre, des discours emphatiques sur la crise sécuritaire. Découvrez le Mali à travers quatre comptes Instagram. Des images insolites, pleines de vie, de soleil, de générosité et de beauté, qui vous donneront envie d’y faire un tour.

Du charivari du grand marché de Bamako aux enfants jouant au foot pieds nus dans les quartiers, aux commerçantes ambulantes d’arachides ou aux femmes battantes des villages, en passant par les immeubles modernes de l’ACI, le quartier huppé des affaires, ces photos révèlent toute la splendeur du Mali. Tout en témoignant encore que la beauté dépasse les frontières des standards que les médias véhiculent.

Paw B Di 

« Paw B DI » ou  « comment vont les choses au Mali » vous passe le bonjour du pays, tout en mettant en avant la culture, les styles de vie, les endroits emblématiques du pays.


Visiter le Mali

Après avoir fait un tour sur ce compte, vous aurez surement envie de venir au Mali. Couleurs, vie, charme, le professionnalisme de ces photos reflète et immortalise avec élégance les réalités su Mali.

Malianpride

Partout dans le monde, Malianpride parle des personnalités qui font la fierté du pays de Soundiata Keita. Les images inspirent le courage, le travail pour exhorter les uns et les autres.

Visit.Mali

Un regard particulier sur la culture et les traditions. Visit.Mali fait voyager dans les profondeurs du pays, à travers sa riche diversité culturelle.

Mélange de culture de tradition avec une dose de modernité, le Mali continuera à scintiller et à faire rêver. N’oubliez pas que mieux vaut visiter une fois, que de voir mille photos.